J'ai pris cette photo hier de cette Tour à Angers appelée Tour des Anglais. Elle a été construite en 1448. Le nom "Tour des Anglais"que porte également cette tour se retrouve dans beaucoup de fortifications du Maine et de l'Anjou évoquant les nombreuses batailles contre les Bretons avec qui les frontières ont été mouvantes. A l'origine presque en bordure de rivière, la Tour de la Haute -Chaîne était encore baignée par la Maine, ce qui n'est plus le cas bien sûr aujourd'hui. Cette tour est un des rares vestiges de la troisième enceinte construite au XIII siècle pour protéger la ville. Elle doit son nom à la chaîne que l'on tendait (en amont) la nuit entre les deux berges pour empêcher le passage des bateaux. Une autre chaîne était tendue en aval (basse -chaîne).
Voici un extrait du journal le "Le petit Courrier" de septembre 1909 où l'on peut trouver un article rédigé par un lecteur :
"Monsieur le rédacteur,
Dans un de vos derniers numéros, vous avez publié un article relatif à la Tour de la Haute-Chaîne, à demi-enfouie dans les décombres ; de son côté dans le "Pays Bleu" monsieur Lelardeux demandait le dégagement complet de ce monument et combien il avait raison.
Ne pourrait -on faire pour elle ce qui a eu lieu pour l'ancien Hôtel de ville sur le boulevard Carnot ?
A ce seul reste des fortifications de la Doutre se rattache un souvenir historique que tout angevin devrait connaître et qui aurait dû mériter à la Tour d'être traitée avec plus d'égards.
Quand les Vendéens au retour de Dol voulurent tenter l'assaut des murs près de la Porte Saint Michel, ce fort -une pièce de 36 hissée sur la plate -forme de la Tour qui battait à la mitraille et à boulet tout le voisinage de cette Porte et les força de se retirer dans la Maison de Saint Serge et dans celles qui l'avoisinaient (récit historique de ce qui s'est passé à l'attaque d'Angers par les Brigands de la Vendée les 18 et 14 frimaire- Angers , Imprimerie Nationale chez Mame).
J'ai encore connu dans mon enfance le pointeur de la pièce, ancien canonnier des vaisseaux de sa Majesté, patriote enragé, qui horriblement sourd, finissait ses jours en tournant la roue chez un coutelier de la rue Saint Etienne , et il était curieux de l'entendre raconter les ravages causés dans les rangs des assaillants par la sûreté de son tir. Jusquà la démolition de l'hôtel Besnardière , on a pu voir incrusté dans le mur de la salle à manger un des boulets du siège. Pour l'avis de ce vieux brave, une de mes amies ravaudeuse , logée dans les maisons accolées à l'ancienne église Notre-Dame, rappelait qu'elle et d'autres enfants assuraient le service des munitions de cette pièce. Ils descendaient du château par les rues de la Cité, se défilaient en rampant derrière les parapets du Grand Pont, chacun portant au cou un sac renfermant une gargousse.
Si nous vivions en Suisse, en Allemagne ou en Belgique, où on fait tout pour attirer les touristes, on eût entouré ce monument d'un joli square , peut-être crée une fête annuelle comme la Promenade au mur de l'Echalade , où chaque année les Genevois vont célébrer leur succès d'avoir repoussé l'assaut des troupes du duc de Savoie. On y eût aussi appris aux petits angevins ce qu'avaient fait leur aïeux.
Chez nous, on a préféré enfouir la Tour pour la déterrer à moitié et la gratifier par surcroît de tous les résidus d'un égout.
Enfin on l'a débaptisée la pauvre. Quand la Tour Guitton a disparu à la Basse -Chaîne (dans la culée du pont du côté de l'abattoir) , on a transféré son nom à celle qui subsistait à la Haute-Chaîne, et maintenant la voilà de par le bon plaisir d'un reporter devenue la Tour des Anglais. Ne pourrait-on enfin lui rendre son vrai nom de Tour Salvert ainsi appelée du ministre protestant qui après avoir sauté des murs fut tué près de là à la Saint Barthélémy ?
Quoi qu'il en soit, prenez la sous votre protection, monsieur le rédacteur, et recommandez la à l'actif et intelligent président du syndicat d'initiative de l'Anjou, monsieur Cochard , sans quoi un de ces jours, on la fera disparaître, étranglée sournoisement sous prétexte d'alignement, tout comme un autre témoin des premiers temps de l'aurore de la Révolution, chêne du chemin des Trois Paroisses route de Sainte Gemmes et un des derniers arbres de la Liberté de la première République sacrifié à l'élargissement d'un chemin qu'on eut bien fait passer 2 mètres plus loin.
Agréez etc."
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